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Le 57ème Régiment d'Infanterie en 1914
1 mai 2006

CA S'EST PASSE PRES DE "LA FOLIE"

La ferme de La Folie, la bien nommée ce jour là…

 La 7e Cie va s’élancer la première, conduite par le capitaine Constans. Parmi les camarades de Raymond, il y a le soldat Guiraut. Voici une lettre qu'il a reçue le jour du départ et qui contenait des encouragements mais aussi des conseils émouvants quand on connaît la suite. Elle a été trouvée sur lui, par des belges venus relever les corps, conservée pieusement elle a été restituée après guerre, et publiée par le journal de l'amicale du 57ème R.I. Le texte est très représentatif du patriotisme ardent de 1914, partagé par des milieux sociaux très différents. Il s'agit visiblement ici d'une famille bordelaise aisée. Tout y est: Le frère qui, bien que réformé, veut s'engager avec son auto, la soeur (?) infirmière d'hôpital que la mère veut rejoindre, et le père ancien militaire, qui regrette que son âge ne lui permette pas de reprendre les armes.

GUIRAUT

 "...je te le répète, que la balle est aveugle et qu'elle atteint aussi bien celui qui retourne vers l'arrière que celui qui marche de l'avant." Arrivé dans le sous-bois d'où partent des tirs de mitrailleuses, le soldat Guiraut n'ira ni de l'avant ni vers l'arrière, il sera tué sur place.

Morceaux choisis de citations d'actes de bravoure (ou de folie) extraites du livre de Couraud, qui regrette d'en pouvoir citer seulement quelques-uns:

"Les soldats Guiraut, boute en train de son escouade qui le matin même en plaisantant a numéroté "ses abatis" à la craie, Guillot et Léotey, de la 7ème Cie, luttent désespérement pour empêcher le corps du capitaine Constans de rester aux mains des allemands; genou en terre, ils tirent sans répit; blessés, ils continuent leur feu jusqu'à ce que les balles ennemies les couchent sur le corps de leur chef."
Leurs fiches sont réunies ici

« Le lieutenant Delitat, de la 5ème Cie, s’élance à la tête de sa section à l’attaque de l’ennemi, repousse les éléments avancés et les poursuit pendant près de deux cents mètres. Rencontrant de nouvelles unités, se précipite sur elles, entraînant ses hommes par son intrépidité, son courage calme et résolu; il abat de son révolver 3 Allemands dont 1 officier et tombe à son tour frappé à mort. »
Bien entendu qu'il ne devait que tomber frappé à mort le brave lieutenant Delitat... Couraud écrit, quelques pages avant celle des citations, "Sur ce point les Allemands sont en nombre", et "des unités nouvelles montent sans cesse des bas-fonds de la Sambre sur le plateau de Heuleu."
Delitat (et le sous-lieutenant Duclos noté lieutenant sur sa fiche), ainsi que les soldats qu'ils menaient à l'attaque, poursuivant "des éléments avancés", ne pouvaient que tomber sur le gros de l'IR 53, rencontrant ainsi "de nouvelles unités"...

"Le soldat Bérard, de la 7ème Cie, surnommé "le mousse", en raison de son jeune âge et de sa figure juvénile, fils du chef de musique du Régiment, élève du Prytanée militaire de La Flèche; étant en permission à Rochefort au moment de la déclaration de guerre et ne pouvant pas, en raison de son jeune âge, contracter un engagement, obtient du Colonel de partir avec le Régiment, vêtu, armé et équipé en soldat. A Lobbes, il part à l'attaque avec un entrain superbe. Faisant le coup de feu, il est atteint à la joue par une balle, le sang inonde sa figure, il s'essuie du revers de sa manche, continue à tirer et ne quitte enfin la ligne de feu que sur les ordres réitérés du commandant de la compagnie (Le capitaine Constans). Devenu officier, il se fera tuer bravement au Mont-Renaud le 12 avril 1918."
Le jeune Bérard avait 17 ans depuis le 2 mars 1914. Le colonel n'a pas pris une grosse responsabilité comme le laisse supposer Couraud. En effet, le commandant du régiment était bien entendu au courant du décret du 6 août 1914 autorisant "l'engagement volontaire des jeunes gens de 17 ans pour la durée de la guerre", et qui paraitra au journal officiel le lendemain, juste le jour de l'arrivée du 57 en Lorraine.

Il était déjà difficile d'y voir clair dans le récit des engagements des compagnies, et ce ne sont pas les témoignages qui vont venir clarifier les choses. Il en sera partout ainsi, nous retiendrons donc une vue d'ensemble, un patchwork de cris et de larmes, de fuites en avant et en arrière, de fusillades, de corps à corps ici ou là, en un mot une belle pagaille et un échec sanglant.

- De tout, un peu -

Les quatre capitaines . (Utiliser le zoom)

Le capitaine Thomiré, 2ème Cie du 144ème RI. Une stèle a été élevée à l'endroit même où il fut tué, au chemin creux, non loin du cimetière militaire où il repose. (on remarquera un anachronique casque Adrian de pierre au pied du monument). Nul doute que ce brave eut été peut-être tué ou blessé de par sa fonction de commandant-kamikaze de compagnie, comme les autres. Mais le capitaine Thomiré a été victime d'un tir de 75 de l'artillerie française, le chef de la batterie les ayant confondu je suppose à la jumelle avec des allemands ? Mais aussi le lieutenant Sédillot qui était à ses côtés. Extrait du livre d'Alain Fauveau cité plus bas: "...Vers 17 heures, je venais à peine de rejoindre ma section de réserve dans le chemin quand un ouragan de feu, de fer et de fumée se déchaîna sur nous. En un clin d'oeil nous fûmes couverts par des débris de toutes sortes: terre, feuilles, branches brisées. Mes hommes éperdus, jetaient sur moi des regards terrifiés et semblaient demander grâce. La section qui était en action, démoralisée par ce feu qui venait de l'arrière, commençait à lâcher pied. Je me précipitais pour la ramener au devoir et me trouvai soudain devant un spectacle affreux. Le Capitaine Thomiré, mon cher Thomiré, gisait en travers du sentier, décapité par un obus; Sédillot, son lieutenant, était tombé sur son cadavre et râlait atteint d'une horrible blessure au crâne". Quant aux hommes de troupe qui étaient à côté, des morts et blessés aussi certainement avec ce coup en plein dans le mille.
Les premiers morts "suites bavures de guerre" de l'artillerie dans les rangs de l'infanterie française, partout en août 14, déjà, mais les premiers seulement d'une très longue liste durant toute la guerre. (Le général Percin les évalue à 75 000. "Le massacre de notre infanterie", Librairie Albin-Michel, 1921).

La reine des batailles: la peur...

Un compagnon du capitaine Thomiré participait également au combat, le capitaine Charles de Berterèche de Menditte, commandant de la 4ème Cie du 144ème R.I. Un de ses petits-fils, le général Alain Fauveau, a écrit un ouvrage intitulé "Le vagabond de la grande guerre". Souvenirs et impressions de guerre de son grand-père, récits d'une honnêteté et d'une sensibilité rares, voici  un morceau choisi, à lire et à méditer ICI.

Nous n'en finirions plus d'effectuer des recoupements, de comparer les sources, les témoignages, afin de traquer les erreurs, les confusions ou les exagérations, pas assez de place ici pour les citer toutes. Après ce laborieux travail pourtant inachevé, c'est avec un grand soulagement que je vais passer à la suite du parcours de Raymond et de ses camarades.

Et maintenant, marchons...


- Promenade héroïque à Lobbes: (pdf 2 Mo)
- Lobbes Août 14: (pdf 1,6 Mo)
- Mémoire 2001: (pdf 1,7 Mo)
- Les carnets de route du sergent Dartigues: (pdf 1,2 Mo). Du 19 au 23 août.
- Le cahier de Constant Vincent, 7ème Cie: (100 Ko word).
- Un témoin de la 7ème Cie: (pdf 500 Ko) et transcription maison sur word. Nom de l'auteur inconnu. (A noter des précisions sur l'endroit où fut tué le soldat Guiraut, et donc le capitaine Constans et les autres...)

 


 

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